Transcription des pièces

1 - Lettre du 19 août 1825 - Paris - de M. Auguste Lemaire, comme mandataire des héritières du chevalier d’Eon, mesdemoiselles Jacquillat de Vaulavré, adressée au ministre des affaires étrangères pour obtenir un acte de décès de mademoiselle la chevalière Déon (sic).

recto

A son excellence le Ministre d’état au département des affaires étrangères

 

note marginale en rouge :

demande de l’acte de décès de Madame

la chevalière Déon

morte à Londres

cachet : du 20 AOUT 1825

Monseigneur,

Comme mandataire de Mesdemoiselles Jaquillac de Vaulavré, résidantes à Belle-Isle-en-Mer, arrondissement de Lorient, héritières

verso

de Madame la chevalière Déon, décédée à Londres vers l’année 1810, j’ai l’honneur d’exposer à votre excellence qu’il leur est indispensable de produire son extrait de mortuaire à l’appui d’une réclamation d’indemnité ; à laquelle elles ont droit, aux termes de la loi du 29 avril 1825, comme héritières et représentant la dite dame Déon émigré.

En conséquence je viens supplier votre excellence de vouloir bien réclamer cet extrait mortuaire à l’ambassade Française à Londres, et de me le transmettre aussitôt qu’elle l’aura reçu.

Sur la demande qui m’en sera faite, je donnerai communication de ma procuration dans les bureaux du ministère de votre excellence, ainsi que tous renseignements ou pièces que l’on jugerait nécessaires.

J’ai l’honneur d’être, avec le plus profond respect, de votre excellence, le très humble et très obéissant serviteur.

 

Signé Aug. Lemaire

Paris le 19 août 1825

 


2 - Brouillon d’une lettre datée du 25 août 1825 - Paris - du ministre des affaires étrangères, le baron de Damas, adressée au baron Ségnier, consul de France à Londres - demandant aux autorités compétentes de faire le nécessaire pour établir un certificat de décès du chevalier d’Eon. Ecriture difficile.

Recto

Angleterre

le baron Ségnier

Paris le 25 aoust 1825

 

M . le Baron, la famille du chevalier Déon réclame l’intervention du département des affaires étrangères pour obtenir une expédition de son acte de décès : il est mort à Londres vers l’année 1810. Cette pièce est nécessaire pour établir les droits des héritiers par suite de la loi sur l’indemnité.

Vous savez M. le Baron que le mystère qui avait accompagné l’existence du chevalier Déon, a déterminé les autorités Anglaises lors de sa mort, à faire procéder légalement à l’examen de son corps et qu’un procès-verbal authentique qui le [ présente......]

verso

[ses rapports] [demand..][ fut] de revoir pour l’occasion (texte raturé) [le mieux] et serait possible que l’expédition simple de l’acte de décès enlevât les difficultés qui pourraient se présenter ; il serait nécessaire (texte raturé) d’obtenir également un papier certifié du procès-verbal que je vous ferais remettre avec d’autres documents dûment légalisés ainsi que [l’extrait] nécessaire.


3 - Lettre du 12 octobre 1825 - consulat général en Angleterre - Londres - rédigée par le Baron Ségnier à l’attention du ministre des affaires étrangères - évoquant les raisons de son retard quant à sa réponse - et concluant par une anecdote savoureuse concernant le chevalier d’Eon.

recto

Londres le 12 octobre 1825

 

note marginale : sur la demande relative au chevalier Déon

en rouge : C’étoit décidément un homme l’examen n’a laissé aucun doute la dessus ; cet original poussait les précautions à l’extrême pour faire croire qu’il étoit une femme.

 

A son excellence monseigneur le baron de Damas, ministre des affaires étrangères

Monseigneur,

 

Je ne voudrois pas que votre excellence pût croire que je néglige de lui procurer l’extrait mortuaire du chevalier Déon et la copie du procès-verbal qui lors de sa mort a constaté son sexe. Ce qui s’est opposé jusqu'à présent à ce que j’obtinsse la pièce désirée, a été l’absence de M. Bertin médecin de l’ambassade qui a été justement une des personnes appelées à l’examen du corps du défunt ; il ne fait que revenir, et c’est par lui que j’ai appris que le procès-verbal de vérification doit se trouver chez M. Adair (frère du ci-devant ministre Anglais à Constantinople) qui a été aussi un des témoins appelés. Ces témoins sont au nombre de neuf :

Lord Yarmouth

Sir Sidney Smith

l’honorable W. Littleton

M. Adair (éxécuteur testamentaire)

le père Elysée

M. Wilson

M. Copland Médecins

M. Bertin

M. Ring

verso

L’examen n’a pas été long, il a suffi de découvrir le corps pour reconnaître le sexe masculin du chevalier Déon ; aucune bizarrerie de la nature n’a protégé le rôle qu’il s’est plu à jouer si longtems.

J’ai appris une anecdote qui prouve jusqu'à quel point il portait attention pour ne rien faire qui le trahit. Le ministre Anglais curieux de reconnaître quel étoit réellement son sexe, le faisoit suivre et surveiller dans ses moindres actions. L’habitude du chevalier Déon étoit d’aller se promener seul le soir au parc ; les gens qui l’observoient le surprirent à différentes reprises s’accroupissant comme le ferait une femme; c’est le rapport qui fut fait à cet égard qui contribua le plus à tromper sur son sexe jusqu’au dernier moment.

 

Je suis, avec respect, Monseigneur, de votre excellence le très humble et très obéissant serviteur.

 

Baron Ségnier


4 - Lettre du 21 octobre 1825 - consulat général en Angleterre - Londres - rédigée par le baron Ségnier à l’attention du ministre des affaires étrangères - présentant les différents documents qu’il a fait établir pour prouver le sexe du chevalier d’Eon.

recto

 

Londres le 21 octobre 1825

 

note marginale : Envoi du procès-verbal d’examen du corps du chevalier Déon et de son extrait mortuaire.

Note en rouge : M. le chevalier de Gères un des témoins, se trouve à Paris rue Notre Dame des Victoires hôtel de 15-20 n°13

 

Monseigneur,

 

J’ai l’honneur de rendre compte à votre excellence par ma lettre du 12 courant (lettre ci-dessus - N.D.L.R.) des raisons qui m’avaient empêché de reprendre plutôt à ses ordres relatifs aux démarches à faire pour obtenir l’extrait mortuaire du chevalier Déon et le procès-verbal qui fut dressé après sa mort pour constater son sexe. Presque aussitôt après avoir donné à votre excellence cette première information, j’ai pu me présenter chez M. Adair entre les mains de qui le procès-verbal se trouve, j’en ai obtenu communication, et même la permission de l’emporter chez moi. Votre excellence en trouvera ci-joint une copie conforme ; c’est plutôt une déclaration qu’un procès-verbal. La pièce est originale et la déclaration entièrement de la main du docteur Copeland qui a fait la dissection ; les personnes présentes y sont nommées par lui. Cette déclaration est suivie de quatre attestations à l’appui, de personnes connues et respectables qui sont venus identifier le corps après la dissection, de manière que le document a toute l’authenticité désirable. La

A son excellence le baron de Damas ministre des affaires étrangères

Verso

plupart des témoins sont encore vivants, tels M. Adair, sir Sidney, Lord Yarmouth (actuellement marquis d’Hertford) M. Bertin, médecin de l’ambassade, M. Ring médecin de l’ambassade de Suède ; ces deux derniers, ainsi que M. Adair m’ont confirmé verbalement l’exactitude de la déclaration.

Un des témoins signataire, M. le chevalier Degères (demeurant à Paris rue Notre Dame des Victoires, hôtel des 15-20 numéro 13) pourrait , s’il était besoin de quelque autre détail être consulté par la famille.

Comme cette déclaration a de l’importance sous différents point de vue, je l’ai enregistrée in extensum dans les livres de la chancellerie, de manière qu’on pourra en tout tems y venir vérifier le fait dans le cas où l’original viendrait à se perdre ; je joins à cette pièce l’extrait mortuaire désiré, tel qu’il a pu être livré.

 

Je suis, avec respect, monseigneur, de votre excellence, le très humble et obéissant serviteur.

Baron de Ségnier

 


5 - Attestation justificative du sexe du chevalier d’Eon (attention 4 images environ 400K)

Recto

Attestation justificative du sexe du chevalier Déon

Copie d’un certificat et de diverses déclarations à l’appui déposés en originaux chez M. Adair demeurant à Londres Charlotte street, Bloomsbury, N°12.

" I hereby certify that I inspected and dissected the body of le chevalier d’Eon in the presence of M. Adair, M. Wilson, le père Elysée and found the male organs of generation in every respect perfectly formed.

Millman street - May 23 1810

Th. Copeland. Surgeon "

Notes marginales :

*Tout ce paragraphe est écrit

de la main de M. Copeland de

même que le certificat qui

précède.

Note du consul général

**Lire Bertin, c’est le médecin

de l’ambassade de France.

Note du consul général

***Signatures originales

note du consul général

The following gentlemen were also present :

Sir Sidney Smith

the honorable W. H. Littleton

M. Douglas

The earl of Yarmouth

M. Hoskins, sollicitor

M. J. M. Richardson

M. King, surgeon

M. Burton**, surgeon

M. Joseph Berger-Patney

Joseph Bramble***

Jacob Delauney***

Déclarations à l’appui

 

Je déclare avoir connu la soi-disante Melle Déon sous l’habit de femme , et avoir vu son corps après sa mort ; en conséquence j’atteste que ce corps constitue tout

Verso

ce qui peut caractériser un homme sans aucun mélange de sexe.

24 may 1810

Le chevalier Degères

 

I declare that I was acquainted with the person who was commonly known by the name of Mademoiselle Déon, and that I have this day seen at N°26n, New Millman street, the body of a male which appears to be the same person.

De Daustanville

 

Je déclare avoir connu la soi-disant Mademoiselle Déon en France et en Angleterre, et avoir servi dans la même campagne en qualité de Capitaine de Dragons au régiment d’Harcourt en même temps que la dite soi-disant demoiselle servait aussi comme lieutenant de Dragons au régiment de Caraman en 1757, et qu’ayant été appelé pour identifier sa figure depuis sa mort, j’ai parfaitement reconnu la même personne du chevalier Déon, ainsi que tout ce qui constitue les parties mâles de la génération en lui, et que l’on m’a fait voir son corps à découvert.

Londres 68 Dean street, Soho 24 may 1810

le comte de Béhagne, lieutenant général des armées de sa Majesté Louis dix huit, Grand Croix de son ordre royal et militaire de Saint Louis, pour servir de preuve à cette vérité constatée.

 

I declare that the chevalier Déon has lodged in my house about three years, that I knew her as a female, and I also declare that upon seeing the body after death, she proves to be a man. My wife makes the same declaration.

William Bowning, 26, New Millman street, Framdling Hospital

 

recto du 2e feuillet

Nous soussigné Consul Général de France à Londres, certifions que la copie ci-dessus a été faite devant nous, et qu’elle est parfaitement conforme à l’original authentique déposé chez M. Adair.

Londres le quatorze octobre mil huit cent vingt cinq

signé : Baron Ségnier

et par M. le consul

Nettement

vice-consul chancelier.

 

Traduction du texte Anglais relaté ci-dessus.

 

Je soussigné certifie que j’ai inspecté et disséqué le corps du chevlaier D’Eon en présence de M. Adair, de M. Wilson, du père Elysée, et que j’ai trouvé les organes mâles de la génération parfaitement conformés sous tous les rapports.

(signé) Th. Copeland.

Les personnes ci-après étant aussi présentes :

sir Sidney Smith etc.

Je declare que j’ai été lié avec la personne généralement connu sous le nom de Mademoiselle Déon, et que j’ai aujourd’huy vu, rue New Millman N°26, le corps d’un mâle qui m’a paru être la même personne.

(signé) de Daustanville

 

Je déclare que le chevalier Déon a logé dans ma maison environ trois ans, que je l’avais toujours cru une femme, et je déclare aussi qu’en voyant son corps après sa mort, il se trouve que c’est un homme - Ma femme fait la même déclaration.

(signé) William Bowning

 

Nous soussigné consul général de France à

verso du 2e feuillet

Londres, certifions la fidélité des trois traductions ci-dessus

Londres le quatorze octobre mil huit cent vingt cinq.

Signé : Baron Ségnier

Par le M. le consul,

Nettement

vice-consul chancelier


6- brouillon d’une lettre datée du 29 novembre 1825 - Paris - du ministre des affaires étrangères ( ?) adressée à M. Lemaire ( ?) mandataires de mesdemoiselles Jaquillac de Vaulavré - dressant le bilan des interventions.

recto

Note marginale :

Angleterre

Mesdemoiselles Jacquillat de Vaulavré

à Belle-Isle en Mer

Morbihan

Au mois d’aoust dernier vous avez fait réclamer M. l’intervention du département des affaires étrangères pour obtenir une expédition de l’acte de décès du chevalier D’Eon, mort à Londres en 1810. Cette pièce est nécessaire à ses héritiers pour établir leur droit aux indemnités accordées par la loi du 27 avril dernier.

Comme il m’avait paru que la production de cette pièce ne suffirait probablement pas pour lever les difficultés que le mystère qui a accompagné l’existence du chevalier d’Eon, susciterait notamment aux héritiers lors de la liquidation de leurs réclamations, j’ai cru devoir faire accompagner l’expédition de son acte de décès, d’une

Verso

copie du procès-verbal dressée lors de sa mort et duquel il résulte que la personne qui avait été connue sous le nom de chevalier d’Eon, était de sexe masculin. Cette pièce que j’ai également [choisi] de vous transmettre vous servira à constater l’identité de sa personne. Je l’ai faite ainsi que l’acte de décès revêtir des légalisations nécessaires pour en attester l’authenticité.

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